bière transgénique

La première gorgée de bière transgénique

Article paru dans le Canard Enchaîné du 11 fevrier 2004, page 5
Les trusts du transgénique, Monsanto et consorts, devraient se réjouir : ils sont sur le point d’obtenir le droit de saupoudrer nos assiettes d’OGM. La Commission européenne vient en effet de se prononcer en faveur de l’importation du Bt ll, un maïs génétiquement modifié. Ce qui, d’ ici trois mois, va ouvrir la porte à trente autres OGM, actuellement dans les tuyaux.

Tout irait pour le mieux pour les semenciers si le Parlement européen n’avait pas décidé qu’à partir du 18 avril prochain, chaque produit renfermant plus de 0,9 % d’OGM devra afficher la mention "aliment contenant des OGM". Or, d’après les sondages, 70 % des consommateurs européens disent refuser obstinément d’ingurgiter pareille mixture transgénique. Pour les convaincre, une seule solution : banaliser dare-dare la bouffe biotechnologique. C’est pourquoi tous les journalistes ayant pondu des articles surr le Bt l1 viennent de recevoir un dossier de presse sur la première bière OGM étiquetée comme telle, accompagné d’une bouteille cadeau. Peu importe que la bière blonde " Kenth ", c’est son nom, ne soit vendue qu’en Suède !

..L’objectif de la manip’ est de montrer aux leaders d’ opinion, et donc aux consommateur francais, qu’un OGM c’est tellement anodin que les industriels sont heureux d’en mettre dans leurs produits et se dépêchent de le faire savoir.

« Je suis fier d’offrir au consommateur une nouvelle expérience gustative, et très heureux d’avoir choisi du maïs bt bénéfique pour l’environnement », dixit le brasseur suédois.

Mais au fait, qui se charge de faire la promotion en France de cette bière non commercialisée ? L’association Deba, pour " Débats et échanges sur les biotechnologies en agriculture " et ses six membres fondateurs : BASF, Bayer Crop Science, Dow AgroSciences, Monsanto et Syngenta, soit le gratin des fabricants d’OGM.

Créée en 2001, elle compte des antennes en Allemagne, Grande-Bretagne, Italie et Espagne, utilise les services d’une agence de relations publiques, IE Consultants, qui gère le site d’information " Biotech Actu » à destination des journalistes (le dernier numéro dresse un panorama des perspectives offertes par les OGM en termes de nutrition. ), propose aux journalistes des rencontres avec des scientifiques triés sur le volet, ainsi que des voyages de presse. Et elle cible également médecins et enseignants, avec des fiches pédagogiques gratuites, et un numéro spécial OGM dans « Le Journal de l’instituteur ", édité par Nathan. Ouf !

Si après ça les consommateurs persistent à faire la fine bouche...